Chronique de Robert Spieler
publiée dans Rivarol
(n°3051 - 14 juin 2012)
Bernard-Henri Lévy vient de commettre un nouveau film, tout à sa gloire, dont le titre est «Le serment de Tobrouk », référence majestueuse au serment de Koufra prononcé par Leclerc qui jurait que les couleurs tricolores flotteraient sur la cathédrale de Strasbourg.
BHL EN GLOIRE
On n’y voit que lui, on n’entend que lui, avec toutefois quelques personnages secondaires tels Hillary Clinton, David Cameron, Benyamin Netanyahou ou Nicolas Sarkozy. On savait déjà que BHL avait libéré à lui tout seul la Libye. On en a confirmation. On découvre un Sarkozy qui justifie ainsi l’intervention française : « J’avais le sentiment d’être en retard sur la Tunisie, d’être périphérique sur l’Egypte… » Voici comment des guerres se déclenchent : le sentiment d’être en retard. Il y a des scènes amusantes cependant, dans le film. Une pastèque manque de tomber sur la tête de notre génie de la géopolitique. Dommage, elle l’a raté... On y découvre la scène, baroque au possible, où BHL s’adresse aux représentants des tribus, déguisés comme dans Nabbucco, où il leur annonce sa judaïté : « Je suis moi-même l’héritier d’une très ancienne tribu.»
Ça va, on avait compris... Il y a dans le film un moment grandiose, quand BHL s’avance lentement, accompagné de quatre chefs rebelles, dans les allées du cimetière militaire français de Tobrouk. Réunis sous la croix de Lorraine, ils jurent de «ne pas se séparer tant que la Libye ne sera pas engagée sur le chemin de la démocratie.» BHL en plagiaire du serment de Koufra... On découvre aussi un BHL qui pense et qui s’en remet à la sagesse juive en déclarant : «Ce qui va plus loin que tes oeuvres, ne t’en mêle pas.» Je n’ai absolument rien compris à cette déclaration, apparemment d’une grande profondeur, et remercie les lecteurs de RIVAROL qui pourraient m’éclairer... Revenons au film. Tous ceux qui l’ont vu le jugent nul. Aussi nul que celui que BHL avait consacré à son héroïque intervention en Bosnie. Pour une fois, rendons hommage à Audrey Pulvar, qui n’est certes pas de nos amies, qui n’a pas hésité à dire, dans l’émission « On n’est pas couché » tout le mal qu’elle pensait du film : « On ne voit que vous. Vous masquez le peuple libyen dans ce film et, notamment, ce qui est dommage, c’estqu’on sent très bien que ce film est là pour convaincre les sceptiques que vous avez vraiment fait ce que vous avez fait », avant de l’assassiner proprement en déclarant : « On a des plans magnifiques sur votre poitrine, sur votre bronzage, sur votre chevelure et quand on a des interviews, c’est “Bernard-Henri Lévy était là ». Bien vu !
En attendant de libérer la Syrie à lui tout seul, BHL s’autorise une petite échappée en France, tendance équipée de la 2e DB. Quand il n’est pas attablé au café de Flore,où il a ses habitudes, il part en croisade, tirant à boulets rouges contre Marine Le Pen et ses électeurs. Il vient de déclarer sur RMC : « Les électeurs FN sont obsédés par des chiffres généralement faux des immigrations, des flux, des machins… (C’est quoi des “machins” ?) ils savent ce qu’ils font. Et c’est pas du tout un vote de défiance, c’est un vote d’adhésion à des idées qui sont des idées dégueulasses, racistes, antisémites, haine de la France, parce que c’est quand même ça que respire Marine Le Pen : la haine de la France !» En attendant, BHL ne respire certes pas la haine d’Israël, puisqu’il a déclaré à propos de son intervention en Libye : « J’ai porté en étendard ma fidélité à mon nom et ma fidélité au sionisme et à Israël. » C’est pas beau ça ?
BHL ET LE BOIS D’ÉBÈNE
On sait que le « bois d’ébène » qualifiait le trafic d’esclaves. Dans la famille Lévy, on s’y connaît en bois, en exploitation du bois et en exploitation des Africains. On connaît BHL, on connaît sa fille Justine, auteur à bobos, on connaît sa deuxième épouse, Arielle Dombasle, mais qui connaît son père, André ? Il est vrai que BHL se montre plutôt discret quant à cet oiseau. Il traita pourtant de très juteuses affaires africaines, exploitant le bois précieux de Côte d’Ivoire, du Cameroun et du Gabon. C’est une histoire déjà racontée par deux journalistes, Nicolas Beau et Olivier Toscer, qui avaient publié en 2006 une enquête intitulée fort judicieusement « Une imposture française ». Mais il n’y a pas de mal à se faire du bien en rappelant quelques petits détails. Les conditions de vie et de travail imposées aux ouvriers dans les concessions gérées par l’entreprisedes Lévy, la Becob, étaient ignobles : salaires en retard, équipements sanitaires déplorables, un ruisseau pollué pour s’alimenteren eau. Cela ne traumatisa pas outre-mesure BHL, qui fut chargé de la communication interne, et fut même le dirigeant pendant deux ans. C’est ainsi que la sueur africaine alimenta généreusement le compte en banque des Lévy. Jusqu’au jour où les affaires périclitèrent. Mais pas de souci. Grâce à ses relations, BHL obtint un prêt de plusieurs millions de francs, à un taux particulièrement avantageux, avant d’obtenir de François Pinault le rachat de l’entreprise. Pour, il est vrai, une somme modeste : 120 millions d’euros.
LA LICRA EN ÉMOI
Les récentes agressions antisémites, notamment celle de trois juifs par une bande de Maghrébins à Villeurbanne, ont pour curieux effet de lui ouvrir les yeux. Voici les récentes déclarations de l’avocat Gilles-William Goldnadel : « Aujourd’hui, dans l’immense majorité des cas, cet antisémitisme violent est issu de la communauté maghrébine. » Et puis, tenez-vous bien : « Il ne faut pas non plus sous-estimer une sorte de racisme anti-français, une sorte de racisme anti-Blancs. » Quant au patron de la Licra, Alain Jakubowicz, connu pour sa haine des nationalistes qui osent s’opposer à l’invasion islamique en France, lisez ce petit chef-d’oeuvre de contorsion et de souffrance : « Je peux vous dire que pour le président de la Licra que je suis, ce n’est pas facile à dire. Mais il faut le dire parce que je crois que nos hommes politiques, mais également les services de police, ne nomment pas suffisamment les choses (mais quelles choses ?). Il y a une forme d’angélisme, on est en pleine campagne électorale, et aujourd’hui on veut ménager les Juifs, on veut ménager les Arabes, on veut ménager ceci, cela… Et du coup, on ne dit pas les choses.» Mais quelles choses ?
MAIS QUE FAIT LA LICRA ?
Israël vient d’autoriser l’expulsion de 1 500 illégaux du Soudan du Sud. Cette décision, prise par le tribunal administratif de Jérusalem, a été saluée par le ministre de l’Intérieur, Eli Yishai, qui a déclaré : « J’espère que ce n’est que la première des nombreuses étapes qui nous permettront également d’expulser ceux de l’Erythrée et [du Nord] Soudan. »
Le député Danny Danon (Likoud), qui est le président du Comité de l’Immigration, de l’Intégration et de la diaspora, était également enthousiaste quant à la décision du tribunal. A la suite de l’annonce de la Cour, Danon aurait dit à Yishai, « pas de bavardages, il est temps d’agir. Expulsons-les immédiatement ! » Danon, qui est d’évidence un grand humaniste, a ajouté que « les coeurs saignants des gauchistes ont échoué dans leurs tentatives pour empêcher l’expulsion » et que « il n’y a absolument aucune raison pour que 3 000 Soudanais du sud ne soient pas expulsés dans les deux prochaines semaines. »
Il y a actuellement environ 35 000 migrants en provenance d’Érythrée qui vivent en Israël, et 15 000 en provenance du Soudan. Au cours du mois passé, les tensions ont été particulièrement élevées entre les Israéliens et les clandestins africains, ce qui entraîne de grandes manifestations et parfois même des violences, principalement dans le quartier Hatikva au sud de Tel-Aviv.
Dans son communiqué de presse, Yishai a réitéré sa position selon laquelle jusqu’à ce que tous les migrants africains soient expulsés, ils devraient être logés dans des centres de détention spécialement construits, ainsi que dans des villes de tentes, afin de maintenir les migrants concentrés dans une région. Il ne s’agit évidemment pas de camps de concentration. Où êtes-vous allés chercher cela ?
FRANÇOIS HOLLANDE EN PRÉSIDENT NORMAL
Ce qui est étonnant avec les Tartuffes, c’est que, pour paraphraser Audiard, dans les Tontons flingueurs, ils osent tout et que c’est à ça qu’on les reconnaît. Notre Président “normal” s’est rendu à Caen à l’occasion de la commémoration du débarquement des alliés le 6 juin 1944. Parti en voiture, il n’a visiblement pas roulé de façon “normale” puisqu’il a régulièrement atteint la vitesse de 160 km/h avec des pointes à 180 km/h. La voiture de François Hollande avait déjà atteint les 140 km/h dans le tunnel passant sous la Défense, dans les Hauts-de-Seine, alors que la vitesse y est limitée à… 70 km/h. Par la suite, les équipes de BFMTV qui suivaient le cortège à moto « ont pu constater que la voiture présidentielle avait roulé pendant de nombreux kilomètres à plus de 160 km/h », alors que la vitesse est limitée à 130 km/h.
Arrivé sur place, François Hollande n’a pu éviter les questions sur le trajet. « Vous avez pris la voiture pour venir au mémorial ? », a d’abord demandé un reporter de BFMTV. Réponse du président : « Il valait mieux parce qu’il y a un gros problème avec le train ici, je ne vous parle pas de l’avion, qui ne correspond pas à mon mode de déplacement ». « Pas d’excès de vitesse ? », relance un journaliste de RTL. Et puis, la bouche en cul de poule, notre Tartuffe en chef de répondre : « Pas d’excès de vitesse, je ne sais pas. Cela a été signalé ? ».
Dès les premiers kilomètres, le convoi du président avait bafoué les règles imposées par la « charte de déontologie » voulue par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Celle-ci stipule en effet que Président et ministres doivent, dans la mesure du possible, se déplacer en train ou en voiture et respecter le code de la route. Hollande vat-il être sanctionné par son Premier ministre ?
Valérie Trierweiler en appelle aux lecteurs de RIVAROL. Il s’agit évidemment d’une petite exagération de ma part. Mais ce qui suit est tout à fait sérieux. La concubine de François Hollande cherche un nouveau terme pour remplacer celui de « première dame ». « Ce n’est pas que je n’aime pas », dit-elle dans une interview diffusée sur France Inter, « mais je trouve ça un petit peu désuet. » Et la première petite amie de France de poursuivre, avec une grande profondeur : « Comme je souhaite un petit peu changer les choses, je trouve qu’il faudrait renouveler ce terme », ajoutant qu’elle trouve “parfait” qu’on l’appelle par son nom, Valérie Trierweiler.
Mais comment, diable, pourrait-on l’appeler autrement que par son nom ? Valérie Rottweiler, comme certains plaisantins se sont amusés à le faire ? Question du journaliste : « A-t-elle une idée pour remplacer l’expression “première dame” ? »
Non, pas encore. Elle dit recevoir des propositions de Français qui lui écrivent. Un lèche-botte de chez lèches-bottes lui aurait proposé : « L’atout coeur de France, première journaliste »…
LA BELLE VIE DES ANCIENS PRÉSIDENTS
Nicolas Sarkozy n’a pas réellement de souci à se faire quant à son avenir, sur le plan financier. Il touchera une retraite de 6 000 euros mais aussi le droit de siéger au Conseil constitutionnel (12 000 euros supplémentaires). Mais cela n’est rien par rapport aux avantages annexes. La République met à sa disposition un appartement de onze pièces, de 323 mètres carrés, au premier étage d’un immeuble haussmannien, rue de Miromesnil, au coeur du Paris luxueux. Le loyer, 15 000 euros par mois, est pris en charge par l’État, en plus des frais annexes (eau, électricité, gaz, téléphone). Sarkozy aura droit à sept collaborateurs à temps complet, plus deux domestiques et deux fonctionnaires de la Police nationale, chargés de sa sécurité. Il disposera d’une voiture de fonction avec deux chauffeurs, et ses voyages en train ou en avion ne lui coûteront rien, pas davantage qu’à son épouse. Si d’aventure il lui venait une petite velléité de se rendre à l’étranger, pas de problème : l’ambassadeur du coin sera chargé de l’héberger. Giscard d’Estaing se signale par sa rapacité. Lui qui cumule de multiples retraites et émoluments (Conseil constitutionnel, ancien Président de la République, député, inspecteur des Finances, conseiller régional et conseiller général), soit 30 000 euros par mois, vient d’obtenir deux domestiques supplémentaires pour ses gigantesques bureaux du boulevard Saint- Germain. Voilà comment cela se passe dans cette République.
CES ÉTONNANTS IMPOSTEURS
Nous avions déjà, dans ces colonnes, pu nous pencher sur quelques étonnants imposteurs. L’auteur de ces lignes avoue sa fascination pour l’incroyable capacité de mensonge, de duplicité, de mythomanie et d’imposture dont certaines personnes sont capables. Il compte écrire un livre, peut-être sous une forme romancée, pour raconter ses expériences dans l’étonnant monde du mensonge et de la mythomanie. En attendant, lisez ce livre « Histoire d’imposteurs », de Philippe Di Falco (La Librairie Vuibert, 224 pages, 15,90 euros). Il évoque notamment la figure de Louis de Rougemont, remarquable explorateur des terres australes, dont un magazine, qui eut un succès fou, compila des dizaines de reportages, dans les années 1898. Rougemont se présentait comme un explorateur intrépide qui avait baroudé urbi et orbi. Sauf que… tout était faux. Il n’avait jamais mis les pieds hors de sa chambre. Le 20 avril 1983, paraît dans le magazine allemand Stern, l’équivalent de Paris-Match, le scoop du siècle : « Le journal intime d’Adolf Hitler ». Ce sont « 62 carnets noirs couverts d’une écriture nerveuse, celle d’un hypocondriaque qui évoque plus volontiers ses chiens, sa femme et ses maladies que la guerre » qui seront publiés. Passionnant. Sauf que c’était un faux, confectionné par Konrad Kujau, brocanteur, laveur de vitres et accessoirement faussaire. Un faussaire de très grand talent. Comme le sont, au demeurant, souvent les mythomanes, les menteurs patentés et les manipulateurs. Un monde vraiment étonnant.